Je ne comprends pas
"Merci", "S’il te plaît", "Pardon", ce sont des
formules simples, faciles d’emploi, et qui rendent le monde plus agréable.
Il y a d’autres formules, qu’on garde pour soi par timidité, ou par fierté mal placée. Parmi elles, il y en a une qui devrait être
réhabilitée d’urgence, c’est le « je ne comprends pas ».
En disant « je ne comprends pas », on résiste aux
discours formatés des conseillers en communication, grands manipulateurs de
l’information.
Je ne comprends pas pourquoi un individu deviendrait moins
dangereux une fois déchu de sa nationalité ; pourquoi les fournisseurs
d’accès à l’Internet devraient être tenus pour responsables du filtrage du net
en ce qui concerne les jeux en ligne, alors qu’ils ne l’ont jamais été en ce qui
concernait les sites pédopornographiques.
On résiste aussi aux campagnes publicitaires destinées à
nous créer de nouveaux besoins.
Je ne comprends pas pourquoi j’aurais besoin d’un écran
plat, d’un téléphone 3G, d’une palette graphique…
Et enfin, on résiste à la culpabilisation qui s’abat sur
nous lorsqu’on essaie de sortir de la norme.
Je ne comprends pas pourquoi je n’aurais pas le droit de
vivre dans une grange ; pourquoi, sous prétexte que mon petit frère
télécharge ses dessins animés préférés, on veut me couper mon accès Internet, alors que j’en ai besoin pour mes études.
Bref, le jour où tout le monde dira « je ne comprends
pas » d’une seule voix, on arrêtera peut-être de nous prendre pour des
imbéciles.